Les expériences « muettes » des habitants se mettent à "parler"
Avant la disparition du bâtiment de 18 étages du paysage du quartier du 8 mai 1945, Hervé, Annick, Claudette, Mounir et tant d’autres habitants ont tenu à laisser leurs « signatures provisoires » où leurs expériences « muettes » se mettent à parler. « Mes enfants te disent adieux amours » ; "Ici ont vécu des habitants qui ne t’oublieront pas !" ; "Adieu, merci de nous avoir hébergés !" ; "A la tour, fruit de toutes générations !" : telles sont quelques unes des expressions qu'ils/elles nous invitent à lire sur les murs de leur ancien lieu de vie où ils/elles se sont construit.e.s."
Cette tour m’a aidée à retrouver la solidarité
"J’ai vécu plus de 20 ans avec mes enfants dans la tour, au 10ème étage. Ils avaient 3 et 4 ans quand nous nous s'y sommes installés. Aujourd’hui ils ont 40 et 41 ans. Puisqu'ils ne pouvaient pas venir, j’ai tenu moi à être présente pour mettre un mot sur les murs de cette tour qui m’a aidée à retrouver la solidarité, l'amitié. J’avais toujours des gens qui me gardaient mes enfants, qui me les amenaient à l’école. Voyez-vous je suis partie de la Saraillère en 2007 mais je revenais de temps en temps pour rendre visite aux anciens voisins. Le fait de partir de Bègles pour venir participer à cette action liée à la mémoire de la tour est la manifestation de ma "reconnaissance" en vers elle. Et même si c'est du béton, c’est notre tour, c’est un peu notre mère quoi. J’ai écrit : "Jérôme, Christelle, Claudette : adieu à notre tour qui nous a accompagnés durant toute votre enfance. Merci à toi" " Claudette, habitante de la commune de Bègles.
Il devrait y avoir plus de gamins…
"C’est un petit souvenir pour les habitants. Je trouve l’initiative sympa mais il devrait y avoir plus de gamins pour faire des dessins sur le mur. Ce serait plus "émouvant" s'il y avait plus de jeunes, plus d’interactions entre les générations. Mais c'est bien de voir comment les habitants expriment leur attachement à cette tour." Maïté, représentante du conseil citoyen du haut Cenon.
Les habitants ne t’oublieront pas…
"La tour m’a apporté de la chaleur humaine et j’y ai retrouvé des gens à ma "dimension". Donc, il était naturel que je vienne participer à son « maquillage » et y laisser mes "empreintes". Pour lui dire aussi un dernier « au revoir », j’y ai dessiné mes initiales, mon chat, avec une phrase qui dit : "les habitants ne t’oublieront pas."" Hervé, relogé dans le quartier, à côté de la tour
Je n’ai jamais eu d’aprioris sur Watteau
« J’habitais au n°104 au 2ème étage de Watteau. Maintenant je vis à Mérignac où j’ai été relogée. Je tenais à être là pour mettre mon petit mot. J’ai quand même bien aimé la tour parce que je m’y suis faite beaucoup d’amis. J’avais habité à Bordeaux pendant assez longtemps mais j’avais des voisins qui n’étaient pas très sympas. C'est à l'opposé de ce que j'ai découvert en acceptant d'emménager ici. Ce qui m’a plu quand je suis arrivée ici c’est que tout le monde disait : «bonjour», même s'ils n'avaient pas d'affinité. Je n’ai jamais eu des aprioris sur Watteau. Les amitiés s’y construisent très facilement et on est jamais seul… » Annick, ancienne locataire, relogée à Mérignac
Le bien que Watteau a fait dans la vie sociale de ses occupants
"Ca m’a fait mal quand j’ai appris que la tour allait être détruite. J’y suis attaché grâce à mes enfants qui y sont nés et qui y ont grandi. En plus de ça, le voisinage était bon quand il s’agissait de nous entraider. Avec mes enfants j’ai tenu à dessiner et poser mes traces. Celles-ci vont les aider à comprendre le bien que Watteau a fait dans la vie sociale de beaucoup de ses occupants. Ce travail de mémoire est de ce point de vue très utile. La trace que j’ai laissée est la suivante : "Merci de nous avoir hébergés pendant 13 ans." Mounir, relogé à Cenon
Des relations sociales qui les fixent dans leur quartier
"Le travail de mémoire mené au pied de la tour Watteau est importante. Il donne l’occasion aux habitants d’y laisser des traces car, au-delà du bâti, il y a eu des relations sociales qui expliquent leur envie de partager leurs expériences sur la tour. Les amitiés y sont fortes comme d’ailleurs les interrelations qui sont des "forces de vie" sur lesquelles nous devons nous appuyer pour construire avec eux l’histoire de leur quartier" Benoît, coordinateur de la Maison du Projet à Palmer
A la tour, fruit de toutes générations
Pinceaux à la main, les deux locataires, Aïcha et Claudine, parlent de leur lien avec la tour, de leur relation avec leurs amies qui sont revenues pour participer à l’opération. Mais aussi leur attachement à leur quartier, à leur ville. Aïcha et Claudine, relogées dans le quartier, à proximité de la tour.