En ce début de mois de mai 2018, Espéranto Gironde fête ses 50 ans à Cenon avec un riche programme d’événements gratuits. L’occasion de (re) découvrir cette langue universelle qui se vit et s’apprend à Cenon depuis les années 60. Et se parle sur toute notre planète depuis 130 ans ! Rencontre avec Marcel Redoulez, tombé tout jeune dans le chaudron de l’espéranto.
L’espéranto ? C’est cette langue universelle, détachée de toute idée de nation mais capable de jeter des ponts entre les peuples.
Marcel Redoulez : « Cette langue n’est pas assez connue…. Elle est dite neutre car pas nationale. Elle a été créée à la fin du 19
ème par un Polonais, Ludwik Lejzer Zamenhof qui vivait dans une région du monde où se côtoyaient les quartiers polonais, juif, prussien, russe, dans sa ville de Bialystok. Ces communautés avaient du mal à se comprendre. Ce jeune scientifique voulait proposer un moyen permetant à tout le monde de parler la même langue, d’où cette langue très simple au niveau de sa structure grammaticale et de sa formation des mots. »
Cenon et Espéranto Gironde : une longue histoire
C’est dans les années 60 que le Groupe ouvrier espérantiste de Bordeaux devenu Espéranto Gironde s’installe à Cenon. Parmi ses membres :
Léo et Gaïta Robert, instituteurs charismatiques (méthode Freinet). Elle à Cenon, lui à Artigues. Ils décident d’enseigner la langue de Zamenhof.
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Marcel Redoulez, membre de l'association Espéranto Gironde et espérantiste depuis 40 ans
« Je suis un enfant de Cenon, j’ai grandi à Palmer et j’ai eu cette chance qu’à l’école primaire René Cassagne, mon institutrice Gaïta Robert nous a enseigné l’espéranto. On a joué avec cette langue. Cela nous a ouvert l’esprit. Enfant de Cenon et qui a profondément pris ses racines dans l’espéranto.
Adolescent, j’ai pu développer des contacts avec des correspondants à l’étranger, au-delà du mur à l’Est… À l’époque, c’était la Guerre Froide tout de même ! Cette langue m’a donné envie d’apprendre d’autres langues. Léo et Gaïta Robert, mes « parents espérantistes », ont apporté beaucoup à Cenon. Dès que la Maison Pour Tous a ouvert ses portes comme centre culturel au Château Palmer, l’espéranto y a trouvé sa place avec les activités proposées. Léo a continué à y enseigner sans discontinuer jusqu’à sa disparition. Les cours continuent, ils sont gratuits, tous les lundis après-midi... Il y a des gens qui débutent cette langue et des experts qui font des traductions. »
C’est la langue de l’échange, de l’ouverture de la compréhension vers l’autre
Grâce à l’esperanto, on peut voyager différemment, participer à des rencontres internationales, découvrir d’autres langues, d’autres cultures, partout dans le monde, sans la barrière de la langue. « C’est la langue de l’échange, de l’ouverture de la compréhension vers l’autre. Avec cette langue commune, on fait chacun un pas vers l’autre….
Comme je ne suis pas obligé d’apprendre la langue de l’autre et l’autre, d’apprendre la mienne, alors la relation est toute autre… Plus équitable. Quand nous recevons ici des espérantistes de passage, ils ne s’arrêtent pas à l’hôtel, ils sont hébergés chez l’habitant. C
’est ainsi que moi-même, à 19 ans, j’ai fait le tour de l’Europe en m’arrêtant partout chez des espérantistes. Avec cette même langue, Je suis allé en Europe du Nord, de l’Est et du Sud. »
« Le qualificatif de langue neutre ne convient pas à cette langue, du fait de son histoire. Le fait de s’ouvrir aux autres, c’est un engagement ! Les fondateurs d’Espéranto Gironde ont été vite entrainés dans des engagements politiques, sociaux, culturels ouverts sur la rencontre et les échanges d’idées, de toutes les idées.
Les espérantistes s’intéressent au sort des minorités et des migrants»
Les 50 ans, une fête ouverte à tous les Cenonnais, Cenonnaises
« L’événement des 50 ans est ouvert à tous. C’est la vie d’une association qui bouge, a encore plein de choses à dire et à défendre, qui s’exprime.
Cenon est le berceau de notre association, la collectivité nous a toujours soutenus, le siège de l’association est à Palmer depuis sa création. On y donne des cours gratuits. Pour ses 50 ans, Espéranto Gironde saisit l’occasion de s’associer à d’autres structures (Espace Signoret, Médiathèque Rivière), à d’autres associations aussi dont « Des mots et des sons ».
Le groupe Kajto revient à Cenon
« Un point fort : la rétrospective sur l’histoire de notre mouvement en Gironde et des concerts ouverts au public notamment avec Kajto, groupe du nord des Pays Bas (frison), qui a plein de Cds à son actif, et 30 ans de scène dans le monde entier. Or, il a un lien avec Cenon. Il est venu jouer à l’ancienne salle Signoret en 2002, y a connu un beau succès.
[gallery order="DESC" link="file" size="full" ids="https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2018/04/blog18.jpg|Kajto en 2002,https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2018/04/blog9.jpg|dans l'ancienne salle,https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2018/04/blog10.jpg|Simone Signoret"]
[gallery order="DESC" link="file" size="full" ids="https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2018/04/blog17.jpg|Espérantistes de 2002,https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2018/04/blog15.jpg|Marcel Redoulez, déjà MC,https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2018/04/blog16.jpg|Promotion d'une langue équitable"]
Il n’est pas rare que Kajto mette en musique aux Pays-Bas, des textes de chanson écrits à Cenon, par Espéranto Gironde. Et comme ils chantent sur les scènes du monde entier… à Séoul l’an dernier… qu’ils réalisent des Cds…Un jour sur YouTube, on apprend qu’un brésilien s’est emparé d’une chanson. Donc, on se retrouve, nous Cenonnais, à avoir écrit un texte qui a voyagé aux Pays-Bas, un peu partout et aujourd’hui relayé par le Brésil, c’est très fort ! »
« L’espéranto est vivant aujourd’hui plus par la culture . Mais, pas n’importe quelle culture. Pas dans la recherche du profit, du hit –parade.
Les artistes qui chantent en espéranto le font avec toute l’humanité que véhicule la langue. L’espéranto est l’objet de rencontres, de congrès sur tout le globe Séoul, Madrid, Bialystok, Cuba, Odessa… »
« Au Château du Diable, notre président Elvezio Canonica, professeur à l’université Bordeaux Montaigne, donne une conférence en espéranto sur La Divine Comédie de Dante, objet de sa thèse. Alors « L’enfer de Dante » au Château du diable… tout un programme ! »
+ des bonus pour celles et ceux qui veulent en savoir plus :
Comment l’espéranto se transmet-il ?
« Par la littérature en espéranto. D’abord : la traduction d’œuvres de toutes langues. Camus en espéranto a permis à la planète d’accéder à l’universalité de son œuvre. Il y a eu une littérature hongroise très riche en espéranto, pourquoi ? Elle venait d’ frustrés de ne voir leurs œuvres publiées qu’en hongrois et peu traduites vers les autres langues. Enfin, on a des auteurs qui écrivent directement en espéranto, leurs œuvres deviennent d’emblée universelles. L’espéranto est aussi le moyen d’expression d’auteurs , d’artistes, de musiciens, chanteurs. Il y a donc des livres, des CDs, des pièces de théâtre qui seront entendus, apprécié par un public vaste qui n’a pas besoin de traducteurs. Ainsi, au Congrès de Lille en 2005, la Kompanoj de Cenon a fait rire en instantané 400 personnes issues de 80 pays différents.. »
« Les nouveaux locuteurs sont souvent issus de cours gratuits diffusés sur internet. Soit ils apprennent tout seuls, cette langue le permet, soit ils suivent et échangent des cours, ont des correspondants, écoutent des émissions de radios, des musiques en espéranto. A Cenon, nous sommes nous-mêmes correcteurs de gens qui envoient des copies régulièrement. Au vu des informations qui circulent, faisant état de multiples rencontres organisées à l’heure actuelle… Oui, les contacts se sont multipliés et ont changé de lieu avec l’évolution du monde. Prenez par exemple l’ouverture de la Chine au monde… elle s’est aussi traduite par l’ouverture de l’espéranto à la Chine. Un cours vient de s’ouvrir en Chine dans une université, on se retrouve avec 700 étudiants qui veulent apprendre la langue, mais ils n’ont pas de professeurs. C’est ce qui manque aujourd’hui. Mais la démarche est là ! »
Comment enseigner l’espéranto aujourd’hui ?
« Cette langue n’est toujours pas reconnue comme langue officielle par l’Éducation nationale. Elle entre dans les activités annexes. Mais avec les TAP, des espérantistes ont pu présenter, enseigner la langue en école, au collège, dans certains lycées. Notre président est universitaire. Il dispense des cours gratuits d’espéranto, à l’Université de Bordeaux Montaigne, en dehors de ses cours car ce n’est pas une UV pour des étudiants. C’est cette option que nous voulons défendre à Bordeaux, que cette langue soit enseignée comme langue officielle. Ça s’est bien fait en son temps à Paris, à Aix-en- Provence, à Rennes, Clermond-Ferrand, avec des universitaires déjà détenteurs de chaires. »
Dankon Marcelo ! Merci Marcel. Jes, estas agrable interparoli kun vi ! Oui, c’est agréable de discuter avec vous !
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