Elles et ils sont moins d’une dizaine, elles et ils ont entre 11 et 16 ans, regroupés dans le hall d’accueil du centre la Colline ce jeudi soir de juin. Elles et ils sont prêt.e.s, ils ont révisé, se sont préparés ; et même si on devine l’excitation, le stress ne semble pas les neutraliser. Une trentaine de chaises sont tournés dos à l’entrée du centre, le hall se transforme en salle d’audience. Car le public est là pour écouter attentivement, regarder, rire et réagir. C’est Kensso, 16 ans, élève du lycée Jacques Brel de Lormont qui a été désigné pour animer la soirée. Au micro, il déroule le programme que le groupe a concocté sous la houlette des animateurs:
Au menu, slam, saynètes, exposition, jeux de société.
Chacun sa voix
Le sujet du harcèlement a suscité un foisonnement d’idées qui méritaient d’être formalisées. Avec la volonté des animateurs de briser quelques tabous et de poser des mots précis sur une violence aux contours complexes et des agissements parfois difficiles à détecter.
commente Mourad, l’animateur qui a accompagné les ateliers slam. « Certains ont bûché sur une campagne de prévention, d’autres ont conçu des jeux de société, ou encore écrit des textes pour des saynètes ou du slam ». Ce qui est sûr c’est que le sujet les a tous inspirés.
Harcèlement et sémantique
Pour commencer la réflexion, le groupe a défini et catégorisé précisément 4 types de harcèlement : sexuel et cyber-harcèlement, scolaire, moral et physique. Cette première étape a aiguillé les groupes de travail et facilité la recherche et collecte de ressources. Sous la houlette de Sonia et Katia, animatrices, 2 groupes se sont penchés sur la réalisation d’un dépliant informatif, d’une exposition photographique et d’un mur d’expression. A la question « qu’évoque le mot harcèlement », adhérents du centre social, commerçants, voisins, passants... ont livré un ou plusieurs mots aux jeunes « enquêteurs », chargés de compiler et mettre en forme le fruit de cette collecte.
Des mots sur les maux
La réflexion a aussi permis d’approfondir le sens des termes et d’évoquer des situations concrètes qui sont venus alimenter des saynètes, encadrées par Manon, animatrice. Le show man Nordine Ganso est lui même passé au centre la Colline, pour encourager et prodiguer quelques conseils sur les textes et la mise en scène.
Kensso, William et Amel jouent ainsi la scène du racket de goûter au collège, avec Amel dans le rôle pas forcément attendu de la harceleuse, qui se fait remettre en place par plus grand et plus fort qu’elle. Leçon. Des situations dont on pressent que si elles n’ont pas été vécues directement, elles sont néanmoins bien inscrites dans le quotidien des jeunes. Maryam et Walid ont pour leur part choisi de slamer. Ce dernier récite l’histoire noire d’une jeune femme victime de harcèlement de rue.
Il a choisi la musique, écrit les paroles, et interprété avec émotion sa chanson. A 12 ans, Walid, se sent concerné et juge nécessaire ce type d‘exercice « pour faire changer les gens ».
Le jeu des questions
Exercice non moins difficile mais aussi nécessaire pour sensibiliser au harcèlement, la conception d’un jeu de société, pilotée par les animatrices Fiora et Lisa. Imen prend le micro avec ses complices pour expliquer la démarche et présenter « Les harceleurs ». « Nous sommes partis d’un jeu existant, [très connu et très apprécié], le Loup Garou. Nous avons choisi et défini les personnages (le principal, le surveillant, l’élève…), nous avons conçu et fabriquer les cartes et rédiger la règle du jeu. Puis, nous sommes allés le présenter et jouer avec les enfants du centre de loisirs Triboulet». Avec l’idée d’élargir le cercle des personnes sensibilisées au harcèlement. Si le mur d’expression a permis de sortir du centre et de questionner le voisinage extérieur du centre social, la dimension ludique du jeu de société devrait être efficace pour s’adresser aux plus jeunes.
"Ne pas dénoncer, c'est cautionner"
Les organisateurs ont aussi tenu à impliquer les parents dans la réflexion et la conscience des enjeux. Jenny et Jérémy, psychologues de l’association de médiation interculturelle (AMI) ont rappelé quelques définitions et quelques règles à observer.
. Voila pourquoi la sensibilisation et la prévention comptent. « Le harceleur peut être votre enfant qui adopte un comportement [potentiellement délictueux] pour faire rire les copains. Il faut en parler et faire intervenir le collège, les professionnels, même si il arrive que certains soient dans le déni ».
Pour savoir, comprendre et agir, des numéros de téléphone et des sites d’information existent, ils sont recensés dans la plaquette réalisée par les jeunes. (Plaquette en téléchargement à venir)