Théâtre, musique, danse. En avril, à l’affiche de l’Espace Simone Signoret, 3 créations originales habitées par l’Afrique des 20 et 21èmes siècles. Empreintes de la parole vivante d’artistes de générations et d’origines diverses qui se croisent à Cenon, elles questionnent notre rapport au monde. A Cenon, la culture comme énergie. La culture comme source grâce à la parole vivante et à la mémoire des gens d'ici et d'ailleurs, comme ressource à partager,  comme îlot de résistance...  L’Espace Simone Signoret s'est donné pour mission de connecter créations et populations, de faciliter l’accès de tous à toutes les formes de culture, d'ouvrir coeurs et esprits sur le tout-monde. Avec ces 3 spectacles, il réaffirme l’engagement de la ville de Cenon, à donner la parole au territoire dans sa diversité, à ses habitants, ses arpenteurs, ses défricheurs. Ces artistes d’ici n’ont pas froid aux yeux pour aborder les fantômes du passé, les tragédies du présent, les questions d’identité, d’exil…  Si leurs interrogations empruntent des chemins différents, elles convergent. Déchargés des démons du passé qui pèsent lourd dans les bagages, débarrassés des barrières dans les têtes, ne sommes-nous pas soudain devenus plus légers pour pouvoir avancer dans la vie ?

Ce sont des spectacles sur la vie tout court, ils ne peuvent que toucher chacun d’entre nous.

Fara-Fara : Cie Very Cheap Production/Théâtre : 4 avril

Christian Bena Toko, jeune congolais exilé de la République démocratique du Congo (RDC) était lycéen à La Morlette en 2012 et participait au projet À voix retrouvées. Meurtri par son exil, il a écrit en suivant un texte coup de poing Masano na ndule (jouer en chantant en swahili).Malick Gueye, metteur en scène et intervenant au lycée la Morlette et Alice Carré, dramaturge, ont retravaillé ce texte qui s’intitule désormais Fara-Fara (Face à face en lingala). Christian en devient un des comédiens incarnant avec brio une histoire poignante d’exil et d’espoir déçu et celle d’une RDC toujours en quête d’identité depuis son indépendance. Ce récit aux voix multiples s’arrime à 2 événements marquants : Kinshasa1974, combat de boxe Mohammed Ali/Georges Foreman. 2005 : face à face musical entre 2 stars de la musique congolaise. On en sort knock-out. [gallery order="DESC" columns="2" link="file" size="full" ids="https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2017/03/blogFara-Fara-2.jpg|,https://www.cenon.fr/sites/default/files/old-images-blog/2017/03/blogFara-Fara-4.jpg|"] Christian Bena Toko : comédien / la culture est la richesse intarissable du monde « On vient jouer Fara-Fara ici, c’est comme le jouer à Kinshasa ou à Bruxelles. C’est un de mes rêves de le jouer ici ! Cette pièce qui est en perpétuelle mutation porte un message qui, à mon sens, par rapport au Cenon que je connais et aux Cenonnais, a sa place aussi. Je suis un comédien, conteur, écrivain, contemporain qui, en s’imprégnant des vies d’ici ou d’ailleurs, se dit que la culture est la richesse intarissable du monde et que nous devons partager cela avec les autres. Je faisais un peu de théâtre avant, mais là ça a été un déclic. Le théâtre est un moyen d’expression qui nous révèle à nous mêmes, au monde, à l’autre, on se met à nu. Après, c’est une prédestination. La chanson Sikumodja que j’avais enregistrée pour À voix retrouvées au Rocher de Palmer se retrouve à la fin de Fara Fara. » Malick Gaye / Metteur en scène : Les hommes ont des frontières mais la culture, la pensée, la poésie, les arts n’en ont pas. « Fara Fara est un spectacle très lié à la ville de Cenon, une ville qui est à l’image de ce qu’est le monde, pas un lieu retranché, mais divers, toutes opinions, origines et religions confondues. Christian, à l’origine du spectacle, je l’ai rencontré alors qu’il était lycéen à La Morlette. On a noué une relation d’enseignant à élève, puis avec le temps, amicale, puis professionnelle. Il voulait raconter son histoire personnelle, celle d’un congolais venu en occident, ce que cela remuait à l’intérieur de lui. Son 1er texte parlait de sa nostalgie, de son exil, c’était très personnel. Il a travaillé avec Alice Carré, rencontrée sur un autre projet, autour des enfants soldats du Congo. Elle a  réécrit. On s’est retrouvés avec une polyphonie de voix pour un seul comédien. On a retravaillé pour greffer une autre histoire sur celle d’Alice.  Les hommes ont des frontières mais la culture, la pensée, la poésie, les arts n’en ont pas. »

Le Cabinet des Curiosités/Françoise Schanbroeck/Théâtre musical : 14 avril

Françoise Schanbroeck exhume des archives familiales un raid automobile à travers l’Afrique du Sud au Nord, en 1930. Elle s’insinue dans les fêlures du passé. Au passage, elle pulvérise l’imaginaire colonial, l’Afrique fantasmée, l’exotisme de pacotille de ses aïeux. Il y a là comme une urgence palpable. Mais d’autres voyages attendent le spectateur sur ce terreau, intimes, oniriques, gorgés de musique, charriant un long fleuve de mots intranquilles. Chanteuse, percussionniste, conteuse, elle interprète son texte et sa musique avec la complicité du Delta Ensemble : marimba, violoncelle, dispositif informatique multimédia. Françoise Schanbroeck / La diversité ici est une réalité, elle est féconde, elle est en marche, en action... « Je suis percussionniste, j’aime beaucoup les claviers de percussion et la percussion au sens large, ses couleurs et les différentes sonorités qu’on peut apporter grâce à cet univers foisonnant. Donc, cette musique est gorgée de rythmes, de polyrythmies et le challenge pour les musiciens (marimba, percussions, violoncelle, paysages sonores), même si leurs mélodies peuvent parfois sembler assez simples, est de comprendre leur imbrication, dans des trames complexes et mouvantes, et très syncopées. « Je connais bien le territoire de la rive droite parce que je fréquente les milieux artistiques d’ici, comme musicienne, mais aussi comme journaliste. J’y ai fait la connaissance de Babacar Cissé, de Christian Bena Toko et de Malick Gueye, de leur travail. Je suis fascinée par ce territoire, il y a tant de découvertes et de rencontres à y faire. La diversité ici est une réalité, elle est féconde, elle est en marche, en action. C’est vraiment super ! »

Le syndrome de l’exilé/ Babacar Cissé/ Danse : 21 avril

Babacar Cissé, danseur hip hop, chorégraphe de la Cie Associés Crew, danse en solo, avec toute la musicalité et l’expressivité dont il a le secret, l’errance, l’exil, le déplacement forcé, l’arrachement à la terre natale pour se construire à tout prix un avenir par-delà les vastes mers… Cet exil qui perdure sur la terre ferme qui, à peine gagnée, vous exclue… l’exil intérieur, le repli sur soi, fœtal, nécessaire pour un temps se retrouver, le retrait du monde pour créer une œuvre de l’esprit. Murs, boîte, bulle, situation d’enfermement pour qu’explose enfin le désir de se transporter ailleurs. Le corps en mouvement entre alors en danses multiples : hip hop, acrobatie, danse africaine. Une performance époustouflante. Babacar Cissé / Je fais ce travail d’artiste car il me touche profondément. « Ce qui a lancé ce travail ? Des choses en écho au parcours de mes parents arrivés en France en 1976. Je suis enfant d’immigrés. C’était fort pour moi de pouvoir évoquer cela dans un spectacle, à un moment de mon parcours d’artiste. Et puis, tout ce qu’on peut voir ces dernières années dans l’actualité et qui s’accentue en Europe… cet afflux de migrants qui veulent changer de vie, fuir ce qui se passe chez eux et qu’on n’a pas toujours, en Europe, le cœur d’accueillir comme il se doit avec dignité. »Le personnage dans le spectacle fait un voyage qui démarre dans une cabane, une chambre, une prison (?), on ne sait pas où il est mais on sait qu’il est à l’étroit et qu’il va partir pour construire autre chose. Il y a dans le spectacle cette image de bulle liquide dans laquelle je plonge… c’est le ventre de la mère, le repli puis la naissance à autre chose… C’est un hommage aussi à tous ces gens là qui traversent l’océan. » «  Je fais ce travail d’artiste car il me touche profondément. Ce n’est pas que la forme mais aussi le fond. Toute ma famille est au Sénégal à part mes parents. Un de mes cousins m’a dit un jour : Grand cousin, il faut que tu m’aides, je veux faire la traversée… et lui, il n’a aucune idée qu’en France, je suis artiste et que je fais un spectacle qui parle de ce thème là. J’étais bouche bée, c’est dingue ! »   Réservez vos places ici !